Arrachés aux songes

Avant de les écrire il se passe comme un rêve
Où il faut que la nuit de tous ses points s’achève
En laissant place à l’âme qui se veut productive
Et développe ainsi toutes ses forces actives.
En un mot ou en cent, si la prose est au beau,
Il me faut rameuter de mes phrases le troupeau.
Alors, je lâche mon chien qui va chercher des pistes
Et dès lors cabriole en se croyant artiste.
Les premiers mots du jour sont arrachés au songe;
Pourtant j’ai toujours peur qu’ils se ruinent en mensonges,
Qu’ils se dérobent à moi, au fruit de mes idées,
Et livrent sans saveur une pros’ mal possédée.
Car ce qu’il faut en outre, c’est leur donner un sens,
Quand tout mon caberlot peine à la croissance,
Et c’est quand erre au vide l’objet de mes pensées
Que je dois préparer du text’ la traversée.
Il s’agit en effet d’en être le nautonier
De ces mots hasardés, sans pour autant les nier.
Il me faut les conduire à travers tous les autres,
Sans en oublier un qui ne soit pas des nôtres.
Je suis le responsable de toute ma création,
Dont il me faut d’emblée contrôler la passion,
Et si je tire les mots du profond de mon âme
C’est que je m’y écris ad vitam aeternam.

Le 21. 02. 2021. C.B.

La Chimère

Par où allait-il donc ce couple de pêcheurs
Cherchant en quelque endroit à puiser la fraîcheur
De la mer en poisson comme le dû de leur sport ?
Il fréquentait la côte à l’écart de tout port.

Ce qu’il voulait surtout de toute leur aventure,
C’était percer ainsi le cœur de la nature
Et dénicher au pas l’escalier qui descend
Au travers de l’onde d’où le fond est absent.

Il caressait l’idée de ram’ner en surface
L’un de ces monstres enfouis épargné par la nasse
L’une de ces prises uniques, lorsque la création
Vole au secours d’un objet de la pure fiction.

Le jeudi 16 juillet 2018. C.B.

Rajout à une œuvre

Depuis un tableau accroché au mur, je pars en voyage de par la maison. J’en suis son fantôme. Je sors de mon somme pour exprimer cette scène au bord de la mer dominée de ruines. Je m’échappe du thème. Je restitue l’ailleurs. Il me va de me sortir du rien comme un rajout à une œuvre. Je suis fantôme de la création, un peu en sorte l’âme de l’artiste en son absence.

           Le 1er mai 2017.

                  C.B.