Léthé

Sur les bords du Léthé où je me suis fixé je n’ai pas d’autre envie que de nourrir l’oubli, comme si déjà j’étais parti ailleurs, non pas à me ressourcer, mais ne plus exister, à croire que c’est possible au courant de la vie. Les ondes du Léthé, elle coule en mes veines et je le sais fort bien mon sang navigue sur l’enfer.

le 4 août 2021. C.B.

A mon père

Longtemps après ma mort je serai de ce monde
Comme un qui cherche encore à donner de ses ondes,
Le meilleur de l’oubli dont il sera paré.
Quand je serai de vous pour toujours séparé
Je parlerai encore par mon âme d’aujourd’hui,
Car l’objet d’une pensée en rien ne se réduit.
Je vous serai un autre, présent quoi que perdu,
Je serai de nos morts, toute tendance confondue.
Longtemps après ma mort, je serai de l’absence
Celle qui donne à la vie entre nous tout son sens.

Le 27.04.2020. C.B.

Au large de l’être

Sans m’en vanter auprès des autres, je suis leur proche. Je suis des leurs, mais pas qu’en convivialité, en compagnie. Je suis des leurs intrinsèquement au sens où je les sais. Oui, je les sais. Je connais d’eux des éléments que révèle mon appareil : La Sphère Gresco. C’est une boule qui m’apprend des autres leur vie intime ou ordinaire. Voilà comment je suis au jus d’après les ondes émises au large de l’être.

Le 14 novembre 2019. C.B.

Un vol de flamme

Un feu passe sur la lande à une faible hauteur ainsi qu’un message provenant de l’oubli. Il n’a nulle provenance et pas plus de point où se poser. Il traverse les nuits par là où personne n’est, comme s’il cherchait le monde en son absence profonde. Il explore par le vide les espaces désolés où sa flamme affolée exprime ce qui n’est plus en dehors de son vol. Un vol de flamme à ras de lande s’en va visiter les ruines d’une abbaye où se tiennent aujourd’hui des ombres. Un ruisseau abreuve le silence où je me trouve au bord de l’onde.

Le 26. 10. 2019. C.B.

Je cherche un coin où être à moi seul au large des autres. Un coin perdu sans influence. L’un de ces coins où se développe ce qui n’est pas. Je cherche un endroit où l’on peut se tremper à l’ombre d’une absence et puiser en cette onde au flot de la camarde. J’aspire à ne pas être afin de garder des réserves à mon secret d’ailleurs.

                                                                                                                                                                                                    Le 21 juin 2019. C.B.

La Chimère

Par où allait-il donc ce couple de pêcheurs
Cherchant en quelque endroit à puiser la fraîcheur
De la mer en poisson comme le dû de leur sport ?
Il fréquentait la côte à l’écart de tout port.

Ce qu’il voulait surtout de toute leur aventure,
C’était percer ainsi le cœur de la nature
Et dénicher au pas l’escalier qui descend
Au travers de l’onde d’où le fond est absent.

Il caressait l’idée de ram’ner en surface
L’un de ces monstres enfouis épargné par la nasse
L’une de ces prises uniques, lorsque la création
Vole au secours d’un objet de la pure fiction.

Le jeudi 16 juillet 2018. C.B.

Où l’éclairage cherche son nid I

I Par les coins sombres des sous-bois trempés où les branches perlent comme de suée, je te suivrai mon abandon au désespoir. Je te suivrai au bord des boires dont l’onde plonge son ombre au sein des gouffres. Ces lieux perdus et désolés je les voudrais me consoler au plus profond de leur chagrin. Mais pour ces nids de volupté où la tristesse n’est qu’une eau fraîche, je dois garder tout le secret de ma présence. Il ne faut pas qu’un autre de mes semblables devine un seul instant que j’ai été en ces parages. Il s’impose donc que tout oubli devienne l’écrin de mon voyage.

Le 4 mars 2018. C.B.

Le statut de première muse

L’on s’interroge sur cet aspect de notre couple. Mais première muse, c’est comme une miss monde; celle de mon monde. quoi qu’elle ne soit pas souvent là quand j’ai besoin d’elle, et de sa mélodie chantée à mon écoutille. Elle se dérobe de la situasse. Elle n’ajoute pas toujours sa note si je suis hors de sa portée. En résumé, il arrive que ma muse s’exprime en solo, qu’elle garde pour elle en proprio, et que la chique elle me la coupe. Aussi, faut-il un statut; celui de première muse à mon endroit. Ce, afin de préserver mes droits.

Ça, c’est une autre musique qu’elle me délivre aux feuilles. Car elle brouille les ondes. Elle fausse la manivelle à ma boutique en se dérobant. Les jours de ma création sont en danger si elle se refuse à moi. Il me faut lui charmer son âme; qu’ elle me la tourne en exclusive. Je l’avertis : « -Je dois te retrouver…

-Sans blague !

-Oh ! Pas tant qu’ ça… Je souhaite que tu me lègues pour partie l’accès au caberlot de tes âmes. Je sais que tu en as plusieurs.

-Tu sais mieux que moi sans doute… ?

-Tu peux m’ouvrir des portes auxquelles j’ai pas accès. Les portes sombres de l’oubli de ceux qui me hantent. Je sais  que tu peux m’y accorder au cœur des ruines un coin de reconstruction. « 

Le 3 septembre 2017. C.B.

Le lavoir de Fermanville

Le comble de l’épouvante se situe en le lavoir de Fermanville. De l’œil exercé d‘une muse je l’ai appris, un  soir, au bord des eaux stagnantes et moussues. Si vous bavez au creux de ce trou indigne des ruines abandonnées de l’inspiration, il naît une réaction de gaz échappés de toute expression. Le sondage de ces ondes relève du voyage à travers la fange, enfantées par le Styx dont elles sont la résurgence ignoble. Caressez avec moi l’espoir de vous y soustraire. 

Au bord des eaux stagnantes et moussues

Le 17 Octobre 2017. C.B.

La reine des nèfles

       Pendant des mois, au début de l’installation à Beaucaire de mes parents, je me suis fait chier les mercredis et les ouiquendes, quelque chose de balèze !  Jusqu’à ce que je fasse une découverte par un hasard des plus propices. Je me souviens avec précision de la situasse d’alors… J’ai d’abord observé une chose de la part d’une voisine, à cinq maisons de nous. J’ai remarqué qu’en de certains moments elle s’habillait avec goût, voire carrément classe, pour ce coin de cambrousse… Je dis pas que les nouveaux pécores que nous sommes se vêtent en bouseux, mais elle détonnait. Ma question fut, même à cet âge, et relayée sans doute par mon histoire déjà bien embarquée vers l’insolite : « -Mais qu’est-ce qu’elle nous fait ? ! « 

        D’ordinaire, je la voyais pas aux heures endormies de la sieste où moi-même je me trouvais seul. Seulement, la seconde fois qu’elle s’amena et que je la remarquais; ayant foiré la première par manque d’audace; je lui emboîtais le pas discréto. Je me montrais pas davantage que ces bêtes des bois qu’on croit pas là quand on y marche. Je tenais enfin une piste originale et je n’avais de mires que pour son fion. Je jugeais qu’il miachait comme un qui parle du mouvement. J’opérais par petites avancées furtives à la suite de ses charmes. Ils me dopaient l’envie de lui bouffer ses formes avantageuses. Mes phantasmes me suffisaient plus pour me nourrir; j’avais besoin de pratique. Le monde s’ouvrait à moi et je me trouvais sur le bord des occases. Je vais pas nier que la situasse était emprunte d’émotion, mais je me représentais déjà toutes les merveilles de ce châssis de vraie femme surprise par moi. Me menait, le désir de connaître le pourquoi elle se dérobait à la vie du village en de certaines séquences. Elle entretenait peut-être un secret pour emprunter les chemins de traverse. Au vrai, elle me semblait aussi nouvelle que moi en ce cadre champêtre… Les champs où folâtrait le sentier se changèrent en bois à notre approche. C’est de là que ça me prit de m’inquiéter à ce stade du parcours. Etaient-ce les arbres qui me conduisaient à des suppositions ? Je la vis sucer le membre d’un autre, un adulte, plus à sa taille. Je fus vite en débandade. Je m’attendais à ce qu’elle le retrouve et à la perdre comme il se devait. Mais non, elle était plus libre que ça que de retrouver un homme. Elle s’en allait rejoindre son endroit à elle, le séjour de ses espoirs. Et elle ondula de la croupe à cet effet. Je la suivais encore un peu, aux anges. Et là, nous arrivâmes, tellement j’étais pas loin d’elle, en un lieu dont jusque-là je ne concevais pas l’existence. Ca consistait en une ruine de porte avec tout l’encadrement de pierre autour, ouverte, comme si elle invitait à l’entrée. Elle se trouvait là chez elle avec au visage un sourire qui redessinait la situasse sous le jour d’une promesse, et moi j’en aurais mangé volontiers de ces joues caressées de grâce. J’anticipais sur son désir. Parce qu’elle nourrissait un plan en ce sens. Je le bitais assez vite. Depuis les ruines qui s’étendent en pierres éparses elle observait l’horizon qui s’offrait à elle.

          Jusque-là elle avait pas causé, mais elle lâcha, comme inspirée : « -Allez-y de vous promener. Moi, j’imagine… « 

Elle s’adressait en pensée à des couples qui passaient par là, rarement des hommes seuls, et jamais des femmes. Elle restait pas que contemplative; elle se déculotta, sa jolie paire de miches à découvert, du genre de celles qui vous narrent l’une de ces messes du charme à elles toutes seules sur la version des vrais émois. Ca me refourgua le gigourdin en liesse. Ce que j’ai bien capté en sus c’est qu’elle se triturait le bouton d’amour. Elle s’en donnait sans se lasser, du plaisir. ça dura un bail, car il s’agissait d’un lieu de promenade prisé pour son aspect unique de chaos naturel préservé en milieu sylvestre. Elle se retira des ruines et à sa suite je rentrai. Mais elle multiplia par la suite les retours au bercail, et moi itou. Je devenais une compagnie à ses frasques sexuelles. Un supplément de l’ombre à ses activités. Je deviens en effet son espèce de double à la belle au cul de rêve. Je la lâche pas, même si je la vois qu’à nos rencards communs connus que de moi. Je lui sers de couverture. Je veille. J’exerce un rôle en amont des risques. Car elle en prend. Mesurés certes, mais à force de venir là dans les ruines, son petit manège peut se voir… ou se sentir. Tant sur les hommes elle exerce de pouvoir. Sur leurs girelles aussi. Elle capte les ondes du plaisir. Mais elle excite, et ce en tous les sens… Ma jolie a beau être des plus discrètes, ça conduit jusqu’à elle ses manipes à distance.

        Le jour qui nous occupe, y’a plusieurs couples sur le terrain. Ils banquettent en quelque sorte, à l’heure espagnole. Et elle, ma dame, les nèfles à l’air, elle mastique d’elles. Je sais pas ce qui se passe.  Quel avertissement ça produit; elle lâche une flouze ! Est-ce que c’est le nuage, le bruit, un souffle d’influence ? Y’a une des donzelles occupées à bâfrer qui lève la goule… et qui la voit ma douce. Pas moi, je crois. Là, elle est repérée; faut que je m’active. Tant pis pour la discrétion. Je dois la sauver…. Je me manifeste. Je lui tends sa culotte.

« -Venez vite avec moi ! Venez vite !

-Que… d’où ?

-Là là, les autres…. ! Venez vite… !

-Qui vous êtes d’abord ? !

-Pas le temps. ils rappliquent…. ! « 

Et comme un ange venu en trombe la secourir, je fus de son salut. Je sus jamais si la bande des autres nous avaient coursé, mais une fois parvenus dans la cour de chez mes parents  on se roula une pelle d’importance, charmoyés d’émotion.

« -Je me croyais seule, je me croyais seule….  » répétait-elle.

Oui, mais pour moi uniquement.

                                                                                                     Le 9 mars 2015.

                                                                                                                 C.B.