Le lavoir de Fermanville

Le comble de l’épouvante se situe en le lavoir de Fermanville. De l’œil exercé d‘une muse je l’ai appris, un  soir, au bord des eaux stagnantes et moussues. Si vous bavez au creux de ce trou indigne des ruines abandonnées de l’inspiration, il naît une réaction de gaz échappés de toute expression. Le sondage de ces ondes relève du voyage à travers la fange, enfantées par le Styx dont elles sont la résurgence ignoble. Caressez avec moi l’espoir de vous y soustraire. 

Au bord des eaux stagnantes et moussues

Le 17 Octobre 2017. C.B.

Lady Cantagrel

-Moi qui veille sur toi… lui dis-je.
-Tu ferais mieux de me protéger, tu te rendrais plus utile. Ça se prouve, quand on aime une femme.
-Mais je te consacre mes écrits où tu apparais sous les formes les plus variées. Ça n’est pas une preuve suffisante ?
-Je devrais te remercier pour ce déballage de prose en mon honneur ?
-À qui veux-tu que je la dédie ?
-Mais t’as pas le choix d’autres que moi ?! Ça manque pas pourtant. Je t’en prie, ne te prive pas. Alerte les troupes de l’appel d’offre. Je puis t’aider en cette démarche; que je sois plus ton honorée.
-Tu veux que nous effectuions un stage sur les ruines de nos relations ? C’est ça ton souhait profond ?
-Alors, à propos de ruines, le  jour où tu m’en dégotes de choucardes, tu me préviens en urgence. Parce que je suis preneuse. Je veux que tu m’emmènes voir si les amours y poussent mieux qu’un peu partout. Tu ne le souhaites pas ?
-Tu tiens à être instituée Muse des Ruines à la place de Lady Cantagrel ?
-Tu ne bites guère vite mon vieux ! Je veux que les ruines de ton invention révèlent celles de  ma vie.

Le 14 août 2017. C.B.

La veuve grise

Elle ne le remplace pas, et cependant elle cherche son fantôme au travers de sa chasse, comme si par des absences au reste de la réalité elle retrouvait sa compagnie. Il est à elle en ses songes sous l’espèce particulière que l’âme enfante des fantômes du souvenir. 

-Où il est ?! Où il est ? !

-Je ne peux pas répondre à cette question là que tu me poses, ma pauvre chatte. Tu es condamnée aux amours stériles emportées par l’oubli. Si certains croient en leur étoile de retrouvailles aux cieux, moi je n’ai pas de réponse à ta perte.

-Tu sais, j’ai pas plus de peine que ma moitié… Mais c’est déjà énorme. Il n’est plus là où que j’aille où il se portait, avant d’être renversé. Je le retrouve pas.

-J’ai peut-être une idée.

-?… !

-Rendons-nous au cimetière des ruines. Toutefois, s’il en fréquentait une ou des…

Pour la première fois depuis des jours, elle me sourit de son regard fendu avec un sens à sa quête du mort.

Le 22 juillet 2017. C.B.

La muse rivale

À Marivaux.

Ce qui se passe est qu’une muse s’approprie, au passage, l’une de mes idées, au point de la ranger trop bien et qu’elle m’échappe. La mienne de muse demande alors des comptes à l’oublieuse :

-Qu’as-tu fait des délices du songe éveillé ?….

-Quel droit de regard as-tu sur ceci ?

-Le droit que mon homme fait siennes mes pensées ! 

-T’as aucune preuve de ce que tu avances ! Il n’existe pas de propriété intellectuelle rapportée à une muse quelconque, même si tu veux te distinguer en tant que muse.

-Tu parles sans doute de me baiser la gueule grâce au manque de règles ?

-Tout de suite les grands mots, bientôt les menaces… ?

Elle lui vole soudain en pleines plumes que la mienne en est toute remuée. Elle ne sait plus par où donner entre ces dames encolérées. Y’a de quoi divaguer du caberlot par tous les bouts. Y’a de quoi se demander qui est la muse vraiment ? Et ne s’offre à moi qu’une solution afin de m’y retrouver, celle de convoquer mes personnages autour d’une table ronde pour faire le point.

-Sire, si l’on peut se permettre, vous avez trop de muses, quand il n’en faut qu’une, telle la dame du lac.

-Que me conseillez-vous alors ?

-Il vous faudrait Sire, aller en des ruines inspirées.

… Où la bataille d’idées des muses commence…. 

Juillet 2017. C.B.

Les trois muses

 

Comment j’ai rencontré ma muse

  Tout comme moi elle aime les ruines, de celles où l’esprit s’imagine une suite. Mais à l’origine, j’ignore que la muse me charme d’un amour futur pour les pierres anciennes. Je ne sais pas encore qu’elle cherche après un joueur de rimes capable de lui enchanter des duos. Elle ignore elle-même par où s’amener ma muse. Et ce long itinéraire va durer des années et des années entre elle et moi. Ma muse ne m’attend pas, ma muse ne m’espère pas. Elle me rejoint là où je travaille à ne pas me perdre. J’exploite son histoire et tout ce qu’elle peut  tirer de la mienne. Car en mes pauvres aventures, c’est elle que j’approche pour en extraire du potable. Elle creuse à plein l’insondable du caberlot. Elle l’envahit de son histoire comme d’une nouvelle vie à moi qui se fait prose, et elle s’y loge entre les mots ainsi que l’ombre de mes phrases. 

Ma muse ne m’attend pas, ma muse ne m’espère pas

Juillet 2017 C.B.

 

Un homme à muses

Il existe des hommes à femmes. Mais moi je suis un homme à muses. Je les connais mieux que les autres. Enfin, je pense… Je les rencontre sans me forcer à leur rencard. Les muses, ces demoiselles, me viennent visiter au charme de leur concurrence. Et elles mélangent les influences pour tout brouiller. Mais je sais qui leur monte le bobéchon en manière de sape. C’est elle. La mienne de muse. Elle mène la danse à ses compagnes. Elle les drive en soulèvement de leur syndicat. Elle leur souffle de me booster. Elle a de cette complicité rieuse avec elles où elle mine le fond de nos accords de ne rien révéler de la noirceur de nos phantasmes. Je crains qu’elle ne déborde en farce grasse au sein du groupe de ses consœurs. Ma muse à moi est solitaire. Elle est pas de celles  qui s’affolent. Elle sait qu’au sein des autres de muses je préfère sa société en renouveleuse de ses charmes. Elle est l’ensemble à elle toute seule. Sans oublier de capter ce qui fait celui de ses frangines. Mais voilà, elle se pare de toutes, la jeune incomplète qui se réserve à pas d’âge. Elle me poursuit de sa jeunesse,et moi comme si j’en demandais mon dû, je la recrée en conséquence. Je dégage des ruines son passé, par là où je puis me dépasser. 

Elle mène la danse

Le 1er juillet 2017. C.B.

Le caberlot de ma muse

Ma muse est dépassée par le tournis où mon caberlot s’active. Mais il me faut le dire, ça vient de ses propres propos :

– Qu’est-ce que ça te fait d’être muse  ?  Tu pensais jeune que tu le serais ?

– J’en ai rien à foutre !

Il me faudrait l’envoyer sur l’île de Robinson s’éduquer à une vraie complicité.

Là, sur une terre en forme de ruine abandonnée, elle serait mienne, avec un plein de pensée à mon usage. Parce que je le reconnais, je veux le fruit de son caberlot pour moi. Elle m’a traité de voleur d’âme, de purgeur de songes, très récemment encore. Et que lui dire qui ne soit vrai de son analyse de nos rapports : elle porte en elle toute ma détresse.

Le caberlot de ma muse

Un homme sans âme

Je ne suis pas tout à fait net.
Est-ce un propos de femme honnête ?
C’est pourtant ce que ma muse lance
À mon endroit avec violence.
Elle me reproche mes absences
Au quotidien, le manque de sens
Que je mets à la seconder,
D’être pour elle un homme sans idée.
Voilà le propre de ma muse,
Voilà pourquoi elle se refuse :
Je suis un homme sans contenu,
Un homme sans âme par le menu.
Je suis un homme en ruine pour elle,
Rien qu’un objet à des querelles,
Mais pas un vrai qui la soutient;
L’un de ceux-là auxquels on tient.

Le 23 juin 2017. C.B.