Un visiteur

Je recherche les occasions
Où mon sens de l’observation
Peut se nourrir de ces secrets
Qui chez les autres sont encrés.

D’observer seul ne suffit pas;
Il faut aussi se mettre au pas
De ce mental de mon prochain
Avec lequel je suis en train….

J’échange de façon non connue
À l’insu de mon inconnue,
Et en revanche est-ce-qu’elle sait
Qu’à elle je dois tout mon succès ?

L’âme se visite par la fiction
En de multiples apparitions,
Qui me ménage une voie vers vous
Sans nous fixer de rendez-vous.

Un jour ou l’autre je lui serai
Un visiteur venu d’après,
Un visiteur du souvenir
Parce qu’il a su lui venir,

À cette femme et la peupler
De son monde à lui isolé,
Et l’y laisser aux aventures
De ce double de sa créature.

Le 9 décembre 2017. C.B

Un trouveur

Je ne suis qu’un trouveur de vers,
Un vrai trouveur, pas un trouvère,
Mais un chercheur de fantaisie
Qui se pique de poésie.

Mes rimes sont l’âme de mes regrets
Et de mes songes les reflets
Desquelles je ne puis m’échapper
Qu’en m’inventant des épopées.

Je suis le roi des inventeurs
Avec trois mots comme un conteur;
Je n’ai pas plus à proposer
Qu’un instant ma pensée posée.

Le 18 janvier 2018. C.B.

Le jour J

Le jour J où il est mort, j’ai pas pleuré sur sa perte. J’en ai eu d’autres qui me reviennent et amplifiées de par l’absence. Le jour J des obsèques de Jhonny, moi je pensais à Georges Brassens, à Pierre Desproges, à Phonse Treglede, et à d’illustres inconnus au bataillon. Je peux pas m’y faire de pleurer en réunion et sur commande. Je trouve que les miens me manquent un peu partout de ma souffrance, et ça personne me cautérise les plaies. J’en ai des plaies par toute l’histoire, et quand elles se rouvrent, je veux pas que vous soyez là. Ce sont mes ruines.

Le 15 décembre 2017. C.B.

Un ample vent de la tempête

Un ample vent de la tempête
Qui en mon âme se répète
Caresse la plaine de partout
Comme un souffle de bout en bout.

C’est la bourrasque des colères
Qui nous foudroie du sol à l’air
Avec des rages emportées,
Accrochant par tous les côtés.

Allongé au creux de mon lit
J’écoute ces ruines à la folie
Monter le son de leur courroux
Bien à l’abri de mes verroux.

De ces furies je me remplies;
Tout à l’action qui s’accomplit
Avec du cœur des éléments
Un complément à mon tourment.

Le 11 décembre 2017. C.B.

Je suis une ombre perdue au nombre

Déjà je suis d’oubli de vous,
Et cela me plaît je l’avoue
De rester l’inconnu de tous;
Ce péloquin qui passe en douce.

Je me promène parmi vous autres
Qui épouse d’un bord sur l’autre
Avec l’aisance d’un roi de rien
Toutes vos ondes en vrai marin

Parmi vous, je suis à la mer
Et je vais où mon pas se perd
Chercher les ruines qui se dérobent
À la surface de ce globe.

Dedans vos rangs, je suis l’absent
Au point de fuite intéressant;
Je n’ai pas le contact humain
A me frayer en vous, chemin.

Je suis le seul de ma nature
Au secret de ses aventures,
Une ombre exclue sans nul échange
Et qui jamais ne se mélange.

Je suis aussi mort que vivant,
Un moins que l’autre le plus souvent,
Mais c’est mon sort que de manquer
Après une fois tout abdiqué.

Je suis une ombre perdue au nombre,
Je suis un flou, je suis un sombre,
Pas un reflet de connaissance
Ni même un lien avec un sens.

Et cependant, je suis bien là
Aussi ailleurs que me voilà,
Sorti de la face cachée
De la lune quand elle est couchée.

Je n’ vous lâche pas par où que j’aille
Là où le monde est à la taille
De mon errance entre vos traces,
D’un bout à l’autre de votre race.

Je suis en trop, un étranger,
Ne sachant pas se mélanger;
Un qui se fond en  relations
Au domaine des apparitions.

Le 6 décembre 2017. C.B.

Où mon père…

Venu du bord de tout oubli, j’ai rencontré un mien perdu, au commencement de la nuit où l’ombre porte en ses replis comme le fruit d’une liaison. Il m’a parlé du cimetière où l’on croit qu’il est conservé, quand c’est des ruines dont il se pare pour résider. Il m’a dit de ne pas chercher un début à leur découverte, car lui seul peut me contacter. Les ruines secrète de son absence forment l’endroit de mes regrets.

Le 10 novembre 2017. C.B.

Je serai seul quand je mourrai
Comme on l’est de toute sa vie,
Je serai seul sans nul auprès
Que cette absence qui nous ravit.

J’y suis déjà depuis longtemps
Et je sais que rien ne m’attend
Qu’un jour ou nuit trouver mes ruines
Ailleurs, ou sur terre angevine.

Le 30 octobre 2017, C.B.

Mes ruines de paysage

Où sont les ruines de mon enfance
Enrichies de pleine insouciance
Où je courrais vers l’avenir
Sans aucun modèle à tenir ?

Où sont les ruines qui me fuyaient
À l’époque où je me fouillais
L’âme en recherche de l’aventure,
Planquée au cœur de la nature ?

Où sont mes ruines de paysage,
Que j’inventais là au passage,
Entre les zones hors de ma vue
Et que je n’ai jamais revues ?

Le 21 septembre 2017, C.B.